L’inefficacité de l’ordonnance de référé allouant une provision rendue avant l’ouverture d’une procédure collective
CA Paris, 15 juin 2023, (RG n°22/18922)
Des jurisprudences récentes des juges d’appel permettent de revenir sur l’articulation délicate entre les ordonnances de référé dans le contexte de l’ouverture d’une procédure collective.
Si, en principe, le recours à une procédure de référé à l’encontre d’un débiteur récalcitrant peut s’avérer être une solution efficace lorsqu’on souhaite obtenir une condamnation au paiement d’une somme d’argent, la situation est plus complexe face à un débiteur qui montre de véritables signes de détresse financière.
Les articles L. 622-21 et 622-22 du Code de commerce rappellent que le jugement d’ouverture d’une procédure collective interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers tendant à la condamnation du débiteur au paiement d’une
somme d’argent. Seules les « instances en cours » sont reprises lorsque le créancier poursuivant a procédé à la déclaration de sa créance.
Or, une procédure de référé n’est pas considérée comme une « instance en cours » puisqu’elle ne tend qu’à obtenir une condamnation provisionnelle, et n’a donc pas d’autorité de la chose jugée sur le fond.
Ainsi, la demande de condamnation provisionnelle en paiement formée à l’encontre d’une société placée, par exemple, en sauvegarde après l’introduction de l’instance devient, de jure, irrecevable. Cette irrecevabilité doit être relevée d’office par le juge, et il appartiendra alors au juge-commissaire de se prononcer sur la déclaration de créance.
Le créancier, même muni d’une ordonnance de référé en sa faveur, aura donc perdu plusieurs mois – temps qui lui est pourtant précieux du fait des difficultés de son débiteur.
Avant d’introduire une action tendant au paiement d’une somme d’argent à l’encontre de son débiteur, il convient donc de :
- s’assurer de sa santé financière ;
- tenter de trouver une solution amiable ;
- choisir la voie la plus judicieuse et mesurer le risque juridique lié à l’introduction d’une
procédure de référé en cas de difficultés financières du débiteur.