Le Conseil d’Etat valide l’utilisation raisonnée de caméras de vidéosurveillance « augmentées » par la police municipale
Par une ordonnance n°489990 du 21 décembre 2023, le juge des référés du Conseil d’Etat a censuré la décision du tribunal administratif de Caen, qui avait considéré que ce dispositif constituait une atteinte aux libertés.
Certaines collectivités utilisent depuis quelques années des logiciels d’analyse algorithmique des images de vidéosurveillance recueillies par les caméras installées sur la voie publique des communes. Les fonctionnalités d’analyse de ces logiciels permettent la reconnaissance faciale, l’identification de personnes selon certaines caractéristiques (âge, vêtements etc.), le comptage et le traitement statistique de l’affluence ainsi que l’identification de comportements suspects (abandon d’un sac, comportement d’errance suspect etc.)
Au cas d’espèce, l’intercommunalité Cœur Côte Fleurie avait recours au logiciel « BriefCam » pour traiter de manière automatisée les images de vidéosurveillance enregistrées.
Saisi d’un référé-liberté relatif à la légalité de ce dispositif, le juge des référés du tribunal administratif du tribunal administratif (TA) de Caen avait prononcé une injonction à procéder à l’effacement des données à caractère personnel collectées dans ce cadre par une ordonnance n°2303004 du 22 novembre 2023, qui s’appuyait notamment sur la position de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL).
D’une part, en qui concerne la reconnaissance faciale, le Conseil d’Etat a posé un cadre clair : le recours à cette fonctionnalité est interdit, mais la possession du logiciel permettant d’y procéder n’est pas illégale tant que cette fonctionnalité n’est pas activée, la charge de la preuve reposant sur la personne publique utilisatrice.
L’ordonnance du TA de Caen a donc été censurée par le Conseil d’Etat, au motif que, si le recours à des fonctionnalités de reconnaissance faciales est en effet illégal, au cas d’espèce, il est démontré par l’intercommunalité que ces fonctionnalités existantes du logiciel n’étaient pas activées ( démontré par un constat de commissaire de justice) et qu’elles n’avaient jamais été utilisées par les services de police municipale (démontré par des attestations du préfet du Calvados, de la Procureure de la République du tribunal judiciaire de Lisieux et des communes).
D’autre part, en ce qui concerne l’utilisation de certaines fonctionnalités plus spécifiques (research, review et respond s’agissant du logiciel BriefCam), celles-ci sont a priori légales si la personne publique utilisatrice peut prouver qu’elles ne sont pas utilisées en temps réel mais seulement de manière différée, aux fins d’analyses d’affluence, de statistiques ou d’enquêtes.
Conseil d’État, Juge des référés, 21 décembre 2023, req. n°489990, Inédit au recueil Lebon