Taxe d’habitation : interview de Martin Tissier dans la Gazette des Communes
Dans une décision du 17 mars, le Conseil constitutionnel a déclaré inconstitutionnelles certaines dispositions relatives aux modalités de compensation de la taxe d’habitation pour certaines communes membres d’un syndicat de communes. Décryptage des conséquences de cette décision avec Martin Tissier.
Pourquoi avoir fait ce recours devant le Conseil constitutionnel ?
Des communes des Alpes-Maritimes sont venues me chercher au printemps de l’année dernière, parce qu’elles se sont rendu compte, dans le cadre des dispositifs de compensation par l’Etat de la suppression de la taxe d’habitation, qu’une partie de leurs recettes n’allaient pas être compensées. C’est un peu technique. Les communes peuvent financer leurs syndicats intercommunaux de deux manières : soit par une approche « budgétaire », en leur donnant chaque année les moyens nécessaires, soit en leur permettant de percevoir directement une partie des taxes communales, à travers un dispositif dit « de fiscalité additionnelle ». Or, l’Etat a laissé un angle mort dans le dispositif de compensation de la taxe d’habitation, en ne compensant pas la part de taxe d’habitation « intercommunale » perçue via cette fiscalité additionnelle. N’étant pas compensée par l’Etat, ces communes ont dû compenser cette perte en augmentant la taxe foncière.
Il y avait donc une différence de traitement manifeste entre les communes. Celles qui avaient décidé de financer de manière budgétaire leur syndicat ont été compensées intégralement de la taxe d’habitation supprimée, y compris la partie affectée au financement de leurs syndicats. A l’inverse, celles qui avaient opté pour l’option de la fiscalité additionnelle ne voyaient pas la fraction intercommunale de la taxe d’habitation compensée.
Dès le recours devant le tribunal administratif, étiez-vous convaincu de l’inconstitutionnalité ?
Le premier diagnostic était que la loi en elle-même était très claire, ce qui faisait que les directions départementales des finances publiques ne pouvaient pas compenser la part intercommunale parce que cela n’était pas prévu. Donc, on savait très bien que pour essayer d’obtenir gain de cause, il fallait contester la constitutionnalité elle-même de la loi de finances de 2020. Il était évident dès le début que l’on allait déposer une QPC. On avait des arguments forts avec la différence de traitement manifeste et injustifiée ; on était d’ailleurs capable de la chiffrer commune par commune dès l’exercice 2021, le report sur la taxe foncière étant automatique.